Arts Visuels
Ruptures
Farzaneh Rezaei
Du 4 juin au 30 juin 2023
Le parcours qui m’a amenée à la réalisation de l’ensemble de dessins de la série Ruptures a été riche en émotions et en expérience directe et personnelle de la réalité de la vie d’une immigrante. Ce trajet, parfois difficile, m’a apporté énormément, tant dans ma vie personnelle que dans mon processus créatif, et le projet qui en a résulté est le fruit d’une expérience et de recherches enrichissantes à de nombreux égards.
Ce projet m’apparait singulier par le fait que mes dessins parlent de mon expérience de vie d’immigration, une vie fragmentée marquée par de multiples ruptures. C’est un récit à la fois personnel et universel, qui a pris les couleurs des influences qui me sont chères : la miniature; la culture visuelle de mon pays d’origine, l’Iran, les traditions culinaires et l’utilisation des matières et pigment naturels, comme on en retrouve dans l’industrie des tapis persans et son processus de colorisation.
Je dessine sur papier. C’est pour moi plus qu’un support : il devient un environnement que j’explore sous diverses formes, en le manipulant, le pliant et en multipliant ses surfaces de façon à accentuer sa présence matérielle. Cet intérêt pour sa matérialité s’étend aux pigments naturels, comme le safran, une épice typique et irremplaçable dans la culture culinaire iranienne, mais aussi un élément essentiel dans mon bagage de voyage. Chaque fois que je reviens à Montréal en provenance de Téhéran, ma mère m’en donne une boîte. Avec sa belle couleur jaune-orangé, le safran est pour moi une vibrante évocation de l’univers iranien. À la fois substance et surface, le dessin me convie à des explorations infinies. Dans mon travail, le choix de matériaux, qui inclut le papier et les matières et pigments naturels, fait référence à la recherche identitaire dans la culture visuelle persane.
Au lieu de travailler sur une seule grande surface unifiée, j’ai dessiné sur plusieurs papiers, placés les uns à côté des autres, en cherchant l’équilibre entre l’unité générale de l’ensemble et la singularité de chaque dessin. Quand plusieurs papiers construisent un dessin, il s’établit entre ces surfaces adjacentes des lieux de fortes tensions. Les points de contact et de rupture deviennent très actifs et je cherche à y accentuer les effets de discontinuité. La multiplicité des surfaces de dessin évoque des zones géographiques et des espaces de temporalités différenciées, dans un travail qui prend ancrage à la fois dans ma pratique du dessin et dans ma vie, surtout mon expérience vécue dans le contexte de l’immigration.
Crédit photo : Richard-Max Tremblay
Farzaneh Rezaei
Je m’appelle Farzaneh Rezaei artiste visuelle irano-canadienne, née en Iran en 1983. J’ai immigré au Canada en 2014 et j’habite et je travaille à Montréal. En janvier 2021, j’ai finalisé une maîtrise en arts visuels et médiatiques à l’université du Québec à Montréal.
Depuis des années, le dessin et toutes les possibilités expérimentales, intimes et expressives qui le caractérisent prennent une place prépondérante dans ma pratique artistique. Son accessibilité et la simplicité de ses moyens en font un véhicule vraiment unique, permettant une grande proximité avec mes activités quotidiennes, mais plus encore avec la vie nomade que je mène, alors que je me déplace constamment entre Montréal, où je vis et travaille, et l’Iran, mon pays d’origine, où je me rends à chaque année. Et, de fait, la pratique du dessin accompagne tant mes longs que mes brefs voyages, toujours à disponibilité pour rendre mes perceptions du monde.